Alors que les caméscopes se conjuguent au masculin, on l’appelle la V-200. L’emploi du féminin est à l’image du désir qu’elle suscite avant même d’être connue. Ce banc d’essai nous la décrit à la hauteur de nos espoirs. La Sony CCD V-200 fait déjà référence.
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Christian Dartevelle – juillet 1988
Dernier né d’une ligne de camescope Video8 pro Sony dont l’éloge n’est plus à faire, le nouveau CCD V-200 de Sony s’affirme d’emblée comme une nouvelle référence. A cela, plusieurs raisons. Le constructeur a choisi l’excellent capteur CCD, haute résolution, hérité du Sony CCD V-90, tout comme l’obturateur électronique à vitesse variable et les fonctions spéciales (fondu, volet coloré, intervallomètre, générateur de caractères) dérivées du Sony CCD V-100. Il en reprend d’ailleurs les grandes lignes, au plan de l’esthétique et du concept (modèle d’épaule).
Enfin et surtout, il s’agit du premier camescope grand public à enregistrement « digital » – ou numérique – du son.
La vidéo légère accède donc à la stéréophonie. Cette technique est, par ailleurs, reprise en phase de post-sonorisation – ou doublage audio, connu également sous le nom de « dubbing ». Une possibilité qui, jusqu’à présent, était refusée aux camescopes 8 mm limitant ainsi leurs capacités, notamment en production.
Le Sony CCD V-200 fait appel à un capteur composé de quelque 440.000 pixels « utiles », au lieu des 290.000 pixels qui constituent la cible du CCD V-100 : un gain de l’ordre de 52 % en nombre d’éléments photosensibles. Ce qui laisse évidemment présager une définition nettement supérieure des images. Il est, à peu de choses près, identique à celui du CCD V-90. L’un et l’autre sont des modèles de 2/3 de pouce de diagonale, donc de surface plus grande que les modèles ½ pouce couramment utilisés sur d’autres réalisations.
De fait, la résolution horizontale du CCD V-200 atteint pratiquement 400 points/ligne, contre 325 points/ligne pour le CCD V-100. Autant dire que le résultat est visible à l’œil nu, principalement à l’échelle des détails les plus fins, mais également en matière de contraste et de restitution des contours.
Déjà très convaincant, ce capteur de 440.000 pixels l’est aussi dans de nombreux autres domaines que l’on a parfois tendance à négliger.
Ainsi, il ignore l’effet dit « queue de comète », traduit à l’écran par ces trainées lumineuses, plus ou moins marquées, qui accompagnent les brillances dans leurs déplacements (exemple-type : les phares allumés d’un véhicule filmé de nuit). Il neutralise également l’effet de mémoire ou de rémanence. Celui-ci se manifeste lorsque un plan fixe et prolongé apparaît en empreinte, plus ou moins soulignée, sur les images suivantes. Aucun phénomène d’« éblouissement » non plus à signaler. Ces zones blanches, mouvantes, généralement cernées de jaune ou de bleu, selon la nature de la scène, surgissent lorsqu’on passe rapidement d’un plan moyennement éclairé à un sujet très lumineux. Autant d’éléments perturbateurs susceptibles d’affecter les performances de base d’un capteur, c’est-à-dire la définition horizontale et la fidélité de restitution des couleurs. Des altérations d’autant plus dommageables en générale, que la sensibilité du capteur est élevée. Or, celui du CCD V-200 est le plus sensible du marché (5 lux seulement, et sans amplificateur d’appoint !).
C’est dire à quel point les techniques mises en œuvre, tant au niveau du capteur que de l’électronique d’accompagnement, sont remarquablement bien maîtrisées.
Nous citerons à titre d’exemple certaines prises de vues déconseillées où on est amené à cadrer incidemment une source ponctuelle fortement lumineuse telle qu’un projecteur, se détachant sur un fond sombre. Habituellement, en pareilles circonstances, l’écran est barré d’une bande claire et verticale, centrée sur la source lumineuse, cette dernière étant fréquemment soulignée d’un halo coloré. C’est l’effet « smear ».
Rien de tel avec le CCD V-200 utilisé dans ces conditions, ou du moins d’aussi caractérisé. Le phénomène est à peine perceptible : et encore, à condition de se placer, dans le cas le plus défavorable, avec la source ponctuelle située en plein centre du cadre.
Dès lors, toutes les audaces sont permises, y compris les contre-jours sur des surfaces brillantes, mer ou neige. Aucune crainte d’effets secondaires à avoir, pas même de la fermeture brutale du diaphragme, ni du « pompage » (passage rapide et alterné d’une brillance excessive à un obscurcissement des images observées dans le viseur).
La mise au point de l’objectif du CCD V-200 – un macro-zoom 11/88 mm ouvrant à f: 1,2 – est assistée par un automatisme assurant sa focalisation correcte sur les sujets cadrés au centre du viseur.
Mais, contrairement aux précédents modèles, le CCD V-100 et le CCD V-90, l’autofocus a été confié à un très classique système à infrarouges actifs, dont le faisceau, émis de l’avant de l’appareil, au travers d’une « fenêtre » située sous l’objectif, est récupéré au même niveau – après réflexion sur le sujet visé – par un capteur analysant la distance le séparant du camescope.
De conception, sans aucun doute, beaucoup moins moderne que les dispositifs TCL qui se sont généralisés il y a peu de temps, la formule de l’autofocus à infrarouges – utilisée sur le CCD V-7, premier camescope 8 mm de la marque, apparu en 1985 – a néanmoins été choisie pour le CCD V-200. Une option curieuse à première vue qui ne constitue nullement un recul au niveau des performances comme on pourrait être tenté de le croire. En effet, l’expérience a aujourd’hui nettement démontré que les autofocus TCL, dont le fonctionnement est basé sur la détection des contrastes sur les images captées, présentent quelques « faiblesses » au-dessous d’un certain seuil d’éclairement lenteur excessive de réaction, et même incapacité d’assurer la mise au point. Et cela, précisément à l’heure où les camescopes se montrent capables de fournir des images exploitables à très basses lumières. Le cap des 10 lux est, de nos jours, couramment atteint, et nombre d’appareils descendent d’ailleurs en decà de cette valeur, tel le CCD V-200 qui se contente de 5 lux seulement. Rien d’étonnant, donc, à ce que ce dernier ait été doté d’un autofocus à infrarouges, seul capable de fonctionner correctement à d’aussi bas niveaux d’éclairement. L’obscurité, rappelons-le, n’est pas un obstacle à la transmission et à la réflexion d’un tel rayonnement. Par ailleurs, on a pu dire que de semblables autofocus étaient souvent pris en défaut. Dans la réalité, cependant, cela n’est pas aussi fréquent. Certes, filmer au travers d’une vitre pose parfois quelques problèmes de mise au point ; à moins que l’on ne s’entoure de précautions : il suffit de s’approcher suffisamment du carreau ou encore de trouver le bon angle de visée (à l’oblique). De même, des surfaces trop réfléchissantes ou, à l’inverse, dont la réflectivité est inférieure à 20 %, peuvent rendre délicate la mise au point ; tout comme lorsque l’on cadre un sujet éloigné au travers d’un grillage ou de barreaux, en plan rapproché.
Mais ces interdits sont, en fait, les mêmes que pour les dispositifs TCL ; aussi n’y a-t-il pas lieu de les considérer comme spécifiques des systèmes infrarouges. Leur utilisation est nettement plus satisfaisante, en dépit de leur aspect quelque peu « rétro ».
Le capteur du CCD V-200 autorise la sélection de plusieurs vitesses d’analyse des images, suivant la route ouverte par le CCD V-90, le premier camescope de la marque à bénéficier de cette possibilité. Mais il va encore plus loin en proposant cinq vitesses rapides: 1/120e, 1/250e, 1/500e, 1/2.000e et 1/4.000e de seconde. De quoi saisir littéralement un mouvement ou un déplacement, aussi rapide soit-il, dont on pourra à la lecture (au ralenti, principalement) redécomposer avec précision, et sans aucun risque de flou, les phases successives. Par exemple : immobiliser le jaillissement d’un jet d’eau ; stopper la trajectoire d’une balle de tennis ou de golf ; analyser image par image toutes les étapes d’une action sportive… Ce dont peut s’acquitter à merveille le CCD V-200, en lecture au ralenti, en image par image ou en arrêt sur image.
Son tambour d’analyse est, en effet, équipé de têtes vidéo à double azimut. Toutes les fonctions spéciales sont opérantes sans barre de bruit ni sautillement des images visionnées. Un perfectionnement indispensable pour la pleine exploitation des possibilités offertes par les vitesses supérieures de l’obturateur rapide. A condition, bien sûr, que le niveau d’éclairement des scènes enregistrées soit tel que la sélection de ces vitesses ne se traduise pas par un assombrissement trop prononcé des images. En clair, ne pas dépasser la limite des capacités de l’optique, de la sensibilité du capteur et de la réserve de gain des circuits vidéo. Comme en photographie, les images alors sous-exposées sont le résultat d’un moins bon rapport signal/bruit.
Le réglage de la balance des blancs est également automatique. Il émane d’un petit capteur translucide, placé à l’avant et sur le dessus du camescope. Celui-ci est efficace pour des températures de couleur comprises entre 2.800 K et 8.000 K, valeurs correspondant respectivement à la lumière fournie par une lampe à filament de tungstène, et à celle émanant d’un ciel nuageux.
Cependant, il est des situations où le dispositif n’est pas infaillible. Notamment lorsque la luminosité ambiante est insuffisante ; quand la lumière éclairant le capteur est différente de celle reçue par le sujet ; ou encore quand on est en présence de lampes à décharge. Dans ces cas précis mieux vaut recourir à des préréglages pour une utilisation en extérieur à 5.800 K ; ou en intérieur à 3.200 K. Ces deux positions sont alors rappelées dans le viseur, respectivement par les instructions OUTDOOR et INDOOR, évitant de la sorte toute confusion.
Bien que fonctionnant, dans la grande majorité des cas, de façon très satisfaisante, le système de réglage automatique de la balance des blancs aurait gagné en précision si, au lieu de faire appel à un capteur externe, il avait été du type TCL.
Cette formule n’a malheureusement pas été retenue. Inutile donc d’espérer une balance des blancs convenable en mode automatique lorsque le camescope, placé à l’intérieur, cadre un sujet situé à l’extérieur.
Le CCD V-200 n’est pas seulement un camescope très performant, c’est aussi un véritable outil de création. Tout d’abord, au niveau des images qu’il peut agrémenter d’un certain nombre d’effets : fondu à l’ouverture et à la fermeture, volets colorés, titrage des séquences en cours de prise de vues, horodatage des plans enregistrés…
Par ailleurs, il permet de procéder à de très brèves séquences d’enregistrement – 8 images toutes les 15 secondes – grâce à une fonction INTERVALLOMETRE mais aussi de réaliser, au coup par coup, toute une série de courtes prises de vues – d’une durée de 1/6e de seconde – permettant, par exemple, l’exécution d’un programme d’animation, ou, plus simplement, l’accélération du mouvement d’une séquence cadrée.
Réalisé automatiquement, le fondu FADE n’offre pas, comme l’effet de volet WIPE, de choix de couleurs. Il est prévu au blanc ; ce qui, à notre avis, est nettement moins convaincant que le fondu au noir.
L’effet de volet existe comme pour le fondu, à l’ouverture ou à la fermeture. Au préalable, sélectionner la couleur (blanc, bleu, vert, cyan, rouge, violet ou jaune) qui s’affiche séquentiellement dans le viseur.
Il en va de même des lettres, chiffres et signes utilisés au titrage, pour lesquels on dispose de couleurs semblables. En pratique, le titre proprement dit est constitué par dix caractères, de grande taille, affichables sur deux lignes. Il est accompagné d’un sous-titre, composé de six à huit caractères, plus petits, disposés en bas de l’écran. Ces caractères soulignés sont très lisibles, mais il faut reconnaître que leur composition, sur le terrain, n’est guère pratique. Cette opération doit plutôt être envisagée au moment du montage lorsque la caméra, stabilisée, est reliée à un magnétoscope.
Le procédé manque quelque peu de souplesse, d’une part en raison de la recherche séquentielle des différents caractères ; d’autre part, parce que la mémorisation est limitée aux composantes d’un seul titre ou sous-titre. Aussi aurions-nous préféré la technique de numérisation développée sur le Sony CCD V-50, d’une simplicité sans égale et d’un emploi plus immédiat et général.
Le générateur de caractères du CCD V-200 est largement distancé par ses homologues, proposés en option. Non seulement ils mémorisent plusieurs pages de texte mais ils offrent habituellement la possibilité de « scrolling »(défilement de texte). Sachez cependant que le CCD V-200 comporte effectivement, à l’arrière de son boîtier, deux prises destinées au branchement d’accessoires tels que : générateur de caractères, processeur vidéo, « digitaliseur » d’images, etc.
Les utilisateurs auront tout intérêt à s’en souvenir quand ils envisageront d’utiliser l’appareil en post-production.
A la vue de ses possibilités audio, de CCD V-200 passe pour un super-magnétophone, une sorte de R-DAT (Rotary-Digital Audio Tape) qui, en prime, fournirait des images vidéo. Nous ne sommes pas bien loin de la réalité, puisque aux enregistrements audio numériques (PCM), qu’il est effectivement possible de réaliser avec un appareil, on peut « éventuellement » faire correspondre de telles accompagnées de leur message audio « normal », enregistré en FM et en « mono », et doublées, en PCM et en « stéréo », par les signaux audio numériques inscrits sur des pistes spéciales, placées dans le prolongement des pistes vidéo. Ces dernières occupent 180° à la surface du tambour d’analyse du camescope, contre 36° pour les pistes réservées aux enregistrements audio numériques. Cela signifie que les 5/6 de la longueur des pistes décrites par les têtes tournantes sont affectés aux signaux vidéo ; le 1/6 restant réservé aux signaux audio numériques.
Ces signaux correspondent soit au message sonore stéréophonique qui accompagne la prise de vues – repris en « mono » et en FM, en multiplexage avec les signaux vidéo et ceux de « tracking » – soit en phase de postsonorisation, au doublage sonore stéréo.
Cette dernière possibilité est, de loin, la plus intéressante. Elle rend caduc le principal grief adressé aux camescopes du format 8 mm ; à savoir l’impossibilité absolue de modifier le message sonore originel assorti aux prises de vues, sans toucher aux signaux vidéo qui partagent les mêmes pistes que les signaux audio. A moins, bien entendu, de procéder à la copie de ces enregistrements sur un magnétoscope d’un autre standard – VHS ou Beta, par exemple – pour un doublage audio ultérieur. Ou encore de posséder un magnétoscope de salon et de montage, type EVS-800 B, conçu dans le même esprit que le CCD V-200. Auquel cas le doublage sonore peut être directement effectué sur les cassettes 8 mm, sans recourir à la copie, forcément de moins bonne qualité.
De tout ceci, il faut retenir que le CCD V-200 est effectivement le premier camescope à autoriser la post-sonorisation, en numérique et en stéréophonie, de ses propres enregistrements, sans rien perdre de la compatibilité de lecture des cassettes vidéo enregistrées par lui, puisque, en parallèle avec les signaux audio PCM, l’appareil inscrit également, sur la bande magnétique, les signaux audio FM normaux. Ces derniers, il ne faut pas l’oublier, demeurent intégrés aux signaux vidéo au cours des opérations de doublage qui ne concernent que les pistes PCM. On peut donc les effacer et les réenregistrer autant de fois que souhaité ; cela à partir de signaux captés par le microphone stéréophonique de l’appareil, ou provenant d’une source de modulation quelconque, reliée aux bornes de l’entrée LIGNE du camescope ; si on le souhaite, avec des signaux issus, en simultanéité, de ces deux types de source sonore. Bien entendu, à la lecture, il est possible de sélectionner les signaux audio provenant de la piste standard (FM), de la piste numérique (PCM), ou des deux à la fois. Dans ce dernier cas, on constatera alors un très faible écho dû au décalage de l’analyse des deux pistes, porteuses, avant doublage, des mêmes informations sonores. Celles-ci sont donc restituées avec un très faible déphasage.
A noter également que la possibilité de récupérer le son de la piste FM, afin de le réintroduire sur la piste PCM, n’a pas été prévue au cours du doublage. Dommage, on aurait aimé le voir figurer sur une des deux voies stéréophoniques.
A la vue des résultats, il faut bien reconnaître que le CCD V-200 peut prétendre à la plus haute marche du podium. Il est en effet difficile de faire mieux, actuellement, en matière de définition, d’équilibre des couleurs, de résistance à l’éblouissement, de sensibilité… C’est, pour le moment, le seul camescope à faire appel aux techniques numériques d’enregistrement sonore, appliquées aussi bien à la prise de son qu’au doublage audio.
On regrette pourtant l’absence, côté zoom, d’une deuxième position « macro », associée à la plus longue focale de l’objectif. Autre remarque sous forme d’interrogation : pourquoi, sur un camescope dont les performances sont proches de celles de certains matériels « pros », ne pas avoir prévu une entrée « genlock », qui rendrait possible le mélange d’images vidéo en provenance d’une autre source ?
Cela dit, et dans un tout autre domaine, il n’aurait pas été désagréable de pouvoir faire coulisser le viseur sur le corps du camescope, de façon à mieux le positionner en fonction de la morphologie des utilisateurs. Enfin, la poignée de maintien de la caméra aurait certainement gagné à être un peu plus préhensible.
Comme on le voit, les critiques sont mineures et ne portent, en fait, que sur quelques points de détail qui n’affectent en rien l’excellente impression que nous avons retirée de l’expérimentation du CCD V-200. A n’en pas douter, celui-ci va devenir la nouvelle référence en matière de camescope grand public et, vraisemblablement, faire rêver bon nombre de professionnels de l’image et du son.